Prendre le temps de penser

Fermez les yeux. Je veux dire, imaginez que vous les fermez. Parce que si vous les fermez, vous ne pourrez pas lire l’article. Fermez les yeux donc, et essayez de visualiser la dernière fois que vous vous êtes donné le temps de penser. De vraiment, vraiment penser, plus de cinq minutes, à un sujet compliqué. Un sujet auquel on ne répond pas par oui ou non, qui impose pour être compris d’être préalablement informé, et qui parfois interroge vos valeurs plus que votre raison.

En me posant moi-même cette question, je me suis rendu compte qu’il ne m’était, pour ainsi dire, jamais arrivé de penser.

Je me suis alors construit une image sans doute légèrement fantasmée des penseurs antiques, les grands philosophes grecs. Je vais essayer de vous la décrire. Je les imagine en toge blanche, avec leur barbe caractéristique des statues grecques. Je les vois, allongés à l’ombre d’un arbre fruitier,  engourdis par un soleil généreux, bercés par un petit vent méditerranéen. À leur portée, se trouve une cruche de vin et un panier de vivres. Et je les imagine immobiles, imperturbables. Ils sont en train de penser.

Alors d’accord, ce n’est probablement pas exactement comme ça que ça c’est passé. Que Platon, Aristote, et les autres ont eu leurs idées géniales… Et en même temps l’histoire de la pomme de Newton, c’est quand même l’histoire d’un mec qui s’endort sous un arbre et qui, se prenant une pomme sur la tête, en déduit la gravité !

J’ai l’impression que la clé, dans la construction de la pensée, dans la prise de recul, c’est le temps. La méthode aussi bien sûr. Mais il faut du temps pour penser… À l’époque des penseurs antiques, les esclaves réalisaient toutes les tâches communes, et les citoyens libres ne travaillaient pas. Assez commode, comme système, mais difficile à reproduire (les mœurs ont quelque peu changé !). Aujourd’hui, si l’on considère les intellectuels en vogue, on se rend compte que leur occupation principale n’est pas de travailler, mais de penser. Et d’écrire un livre de temps en temps, pour faire rentrer un peu d’argent.

Il faut sans doute commencer à consacrer un peu de temps à la pensée. Et il y a la méthode. À ma connaissance, il y a trois principales manières de structurer sa pensée.

La première, c’est de se mettre activement à penser. À poser un sujet, amener à soi les connaissances, peser les différents arguments, comprendre et débattre de leurs limites. C’est un exercice très difficile.

La seconde, c’est d’échanger des arguments, de débattre. C’est une manière de penser à plusieurs et en réaction à d’autres arguments que les siens, d’autres pensées que la sienne. C’est un exercice plus facile, mais qui a tendance à nous faire penser « en opposition à », plutôt que de construire sa pensée sans préjugés.

La troisième, c’est d’écrire. Écrire est une chose fascinante. Quel que soit notre niveau de vocabulaire ou la qualité de notre plume, écrire nous oblige à penser. D’abord pour formuler des phrases. Ensuite pour construire des idées. Écrire est un exercice difficile. Parce que l’écrit met à nue, il fait peur. Parce que l’écrit est formidablement élitiste, il complexe. Qui suis-je pour écrire ? Qu’ai-je à dire qui n’a pas déjà été dit, en mieux ? 

Un peu de recul, le média que nous lançons, est une proposition de réponse à cette difficulté que nous avons à structurer notre pensée. Pour les auteur.ice.s d’une part, puisqu’ils devront coucher sur papier leurs idées. Pour les lecteur.ice.s d’autre part, puisqu’ils pourront lire des idées accessibles, et se positionner vis-à-vis d’elles.

Un peu de recul souhaite comprendre le monde, et le décrire en prenant… précisément un peu de recul. Loin de l’actualité qui épuise, nous proposerons des idées, des pensées, dans un langage compréhensible parce que nous ne sommes pas des experts, et parce que nous voulons parler à tout le monde. Nous proposerons des fiches de lectures, nous vulgariserons des auteurs. 

Nous prendrons position, car nous sommes tous des citoyennes et citoyens engagés. Vous ne serez pas toujours d’accord avec nous. Et nous ne serons pas toujours d’accord entre nous. Tant mieux, car c’est toute la richesse des idées !

Un peu de recul va étudier plusieurs formats : les articles rédigés sont une première pierre. Mais pourquoi pas l’audio, la vidéo, les « apéro-débats », et autres ? 

Si cela vous intéresse, n’hésitez pas à rejoindre cette aventure !

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